France culture, le 30/11/2005, 15h-16h:
France culture, le 30/11/2005, 15h-16h, fichier son au format MP3 à écouter (52 MO).
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Question de genre, 5ème chapitre, débat: troubles dans le mariage.
«Jamais je n'avais essuyé autant de refus de participer à une table ronde radiophonique. Plus d'une cinquantaine de personnes, des sociologues de la famille, des psychanalystes, le Procureur de la République de Nanterre, le Maire de Rueil-Malmaison ou encore la quasi-totalité des députés-maires qui avaient pourtant signé voilà quelque temps une pétition contre le mariage homosexuel, ont en effet décliné la proposition de venir parler des implications et significations politiques, juridiques et sociales du refus de marier Camille Barré et Monica Léon. Le risque que toutes les “positions” ne soient pas alors représentées, puisque personne n'a de fait voulu venir défendre ce refus, ne justifiait toutefois pas de renoncer au débat puisque choisir de ne pas en parler aurait été déjà une manière de prendre position, fût-ce par défaut. En effet, le silence qui a entouré le non-mariage de Rueil contraste singulièrement avec l'injonction à se positionner et à s'exprimer présente lors du mariage de Bertrand Charpentier et Stéphane Chapin célébré par Noël Mamère en juin 2004.
Il faut bien reconnaître que la question est à la fois beaucoup plus simple et infiniment plus compliquée qu'à Bègles. Sur le papier en effet, rien ne s'oppose à l'union de Camille Joséphine Barré et de Benito Martin Leon, puisque pour l'Etat civil, l'une est une femme et l’autre un homme. Mais Benito Martin, qui se fait appeler Monica, est une transgenre, qui a une apparence et une identification féminine. Et Camille est une transsexuelle qui a changé administrativement de sexe en 1999 après une opération. Camille et Monica sont donc nées de sexe masculin, et toutes deux se définissent aujourd'hui comme des femmes, alors que la première a changé de sexe et non la seconde. A partir de là, les questions se multiplient. Leurs amours doivent-elles être définies comme lesbiennes ou gaies, bisexuelles ou hétérosexuelles? Comment la justice peut-elle s’appuyer, dans son refus, sur la norme et non sur la loi, alors qu’elle avait fait l’inverse à Bègles? Et doit-on alors interroger la démocratie à l'aune de la sexualité, au moment où certaines revendications minoritaires sont jugées trop périlleuses pour l'ordre social? Le mariage transsexuel de Rueil introduit donc non seulement un trouble dans le mariage, mais porte au jour les limites de ce qui se discute et de ce qui ne se saurait se discuter en matière de sexe et de sexualité.»
Invités: Camille Barré, Daniel Borillo (Professeur de droit à l’Université Paris X-Nanterre) et Michel Feher (philosophe, dirige avec Eric Fassin et Michel Tort le séminaire Actualité sexuelle, à l’Ecole Normale Supérieure).
Sur le site de France culture, la page de l'émission On est dans le brouillard, le texte de l'émission en archive.
Mis en ligne le 10/12/2005.
