CONTENTIEUX DE LA SECURITE SOCIALE
ET DE LA MUTUALITE SOCIALE
TITRE IV du Livre 3. - Chapitre 2 -
du Code de 7.a Sécurité Social
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TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE
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Recours: G 208/97
Le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LAON siègeant en audience publique au Palais de justice de LAON le dix sept septembre mil neuf cent quatre vingt dix neuf à neuf heures.
Sous la présidence de Madame [P. D. R.]
Juge au Tribunal de Grande Instance
Assisté de Monsieur [M. L.]
Assesseur représentant les travailleurs non salariés du Régime
Général
et de Monsieur [J. V.]
Assesseur représentant les travailleurs salariés du Régime
Général
En présence de Madame [B.], Secrétaire
Vidant son délibéré prononcé à l'audience
au: 18 JUIN 1999
ENTRE: Monsieur [Prénom NOM]
[adresse]
Demandeur comparant plaidant et concluant par
Maitre ALIZARD avocat au barreau de LAON d'une part
ET: CAISSE PRIMAIRE D' ASSURANCE MALADIE
[adresse]
Défenderesse comparant et concluant par
Monsieur DATCHY dûment mandaté
d'autre part
Par lettre recommandée en date du 18 juin 1997, Monsieur
[Prénom NOM] a formé un recours contre la décision de la commission
de recours amiable de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de LAON notifiée
le 11 juin 1997, refusant la prise en charge d'une hospitalisation
à la clinique [NOM] à [VILLE].
[Prénom NOM] expose qu'à la suite d'interventions chirurgicales de conversion sexuelle, il a vu son état civil modifié par décision de la Cour d'Appel de [VILLE] en date du [jour mois] 1983, étant désormais de sexe masculin.
Il soutient que l'opération litigieuse n'a pas été effectuée dans le cadre du transsexualisme, puisqu'elle n'a eu lieu qu'en septembre 1996, mais avait trait à un problème d'impuissance.
Il fait valoir en effet que les opérations de 1993 à 1995 n'avaient pour but qu'une reconstruction anatomique urinaire masculine, reconstruction qui a entraîné une impuissance.
Il affirme qu'il pouvait donc aller dans l'établissement de son choix, et notamment dans une clinique privée.
Il demande à ce que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie soit à l'avenir tenue de prendre en charge les opérations dont il pourrait être l'objet.
En conséquence, [Prénom NOM] sollicite:
- de dire.que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie devra prendre en charge les frais de l'opération qu'il a subie en 1996 à la clinique de [VILLE].
- de dire que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie sera tenue à l'avenir de prendre en charge les frais des hospitalisations et d'opérations dont il pourrait avoir besoin et qui seraient effectués en clinique conventionnée.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de LAON expose que la lettre ministérielle du 4 juillet 1989 et les instructions relatives à la prise en charge des interventions liées au transsexualisme prévoient que ces interventions ne peuvent être prises n charge que lorsqu'elles sont réalisées en secteur hospitalier public.
Elle indique que, pour les interventions qui ne sont pas prévues à la Nomenclature Générale des Actes Professionnels, le remboursement est conditionné par l'établissement d'un protocole préalable.
Elle soutient que l'intervention du 11 septembre 1996 concernant un problème d'impuissance, il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'une conséquence de l'intervention liée au transsexualisme.
Elle affirme que, l'opération ayant été effectuée dans une clinique privée, elle ne peut prendre en charge les frais afférents.
Elle fait valoir que le tribunal ne peut la condamner par avance à prendre en charge les hospitalisations à venir.
En conséquence, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie sollicite:
- de dire qu'elle a fait une juste application des textes.
- de débouter [Prénom NOM] de ses prétentions.
MOTIVATION
Sur la demande de prise en charge par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'intervention du 11 septembre 1996.
Attendu qu'il ressort des éléments versés aux débats et qu'il est constant que [Prénom NOM] a été opéré à de nombreuses reprises tant dans les années 1970 que de 1993 à 1995;
Que dans ses conclusions, [Prénom NOM] indique:
«Or les interventions de 1993 à 1995
n'avaient pour but qu'une reconstruction anatomique urinaire masculine qui
était techniquement impossible lors des opérations chirurgicales
subies dans les années 1970. Cette reconstruction a entraîné
une impuissance.»;
Que celui-ci fournit une attestation du Docteur [NOM-A] qui indique:
«En avril 1993, j'ai contacté à
plusieurs reprises le Docteur [NOM-B], médecin conseil national de la
Caisse Primaire d'Assurance Maladie à PARIS pour les premières
interventions réparatrices concernant [Prénom NOM].
Ce médecin a admis que compte-tenu de l'ancienneté de la toute
première intervention chirurgicale et du changement d'état civil
depuis 1983, le transsexualisme n'était plus opposable, mais que
l'on rentrait dans le cadre d'une chirurgie reconstructrice et a donc donné
son accord pour les nouvelles interventions.
Par ailleurs, les nouveaux textes sur le transsexualisme sont postérieurs
au changement d'état civil.»;
Que cependant une lettre du Docteur [NOM-C] en date du 30 octobre 1996
énonce:
«Il [Prénom NOM] a bénéficié
d'une chirurgie dé transsexualisme par mes soins dans le service du Professeur [NOM-D]
au C.H.U. de [VILLE] il y a deux ans et souhaitait bénéficier de la mise en
place d'une prothèse pénienne, intervention non réalisée
dans le service dans lequel j'étais Chef de clinique.»;
Que dans le même sens une lettre du Professeur [NOM-E] en date du
16 octobre 1997 indique:
«Cet homme a 48 ans. Il a bénéficié
en 1995-1996 de la mise en place d'une plastie pénienne pour trans-sexualité
par le Docteur [NOM-C] à [VILLE]. Celle-ci a nécessité bien
évidemment la confection de 2 anastomoses, une artérielle et une veineuse
sur le pédicule épigastrique rétro-musculaire.»;
Qu'il apparaît donc, au regard de ces éléments que, malgré l'ancienneté des premières opérations et du changement d'état civil, il faut qualifier d'interventions directement liées au transsexualisme celles dont [Prénom NOM] a, grâce aux progrès technologiques, pu bénéficier à compter de 1993;
Que l'opération du 11 septembre 1996, apparaît être dans la lignée de celles de 1993 à 1995;
Que [Prénom NOM] n'apporte pas la preuve contraire;
Que cette intervention doit donc être qualifiée d'intervention liée au transsexualisme;
Qu'en conséquence il convient de constater que, n'ayant pas été réalisée dans le secteur public hospitalier, l'intervention du 11 septembre 1996 ne peut être prise en charge par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, de débouter [Prénom NOM] de sa demande en ce sens et de confirmer la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du 24 avril 1997 refusant la prise en charge de l'intervention.
Sur la demande de prise en charge des interventions futures nécessitées
par l'état de santé de [Prénom NOM].
Attendu que le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale est saisi par le recours initial, portant en l'espèce sur le refus de prise en charge par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'intervention du 11 septembre 1996;
Que le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale ne peut être saisi d'une demande future et indéterminée;
Qu'il ne saurait être imposé à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de prendre en charge des interventions dont la date, la nature et l'utilité ne sont pas connues aujourd'hui;
Qu'il y a lieu de débouter [Prénom NOM] de sa demande sur ce fondement;
PAR CES MOTIFS:
Le Tribunal statuant publiquement, contradictoirement par jugement en premier ressort,
Confirme la décision de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du 24 avril 1997 refusant la prise en charge de l'intervention subie par [Prénom NOM] le 11 septembre 1996;
Déboute [Prénom NOM] de sa demande de prise en charge future des interventions nécessitées par son état de santé;
Ajoute que tout partie intéressée dispose d'un délais d'UN MOIS à compter de la réception de la notification de la présente POUR EN INTERTEJETER APPEL.
Mis en ligne le 14/07/2004.